(New page: {{menu secção 2}} '''RadiOthello''' '''De « la tragédie d’Othello » à « radiOthello »''' <div class=justificado> '''Othello mal(d)écrit''' Depuis mon adolescence, de ...)
 
 
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'''De « la tragédie d’Othello » à « radiOthello »'''
 
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'''Othello « mal (d)écrit » – Othello comme thème et comme thème de réflexion''' – [[radiOthello parte 12|La condition d’étranger]] – [[radiOthello parte 13|Hamlet Maschine : Une façon de « régler des comptes »]] – [[radiOthello parte 14|L’auteur, la voix de ceux qui n’en ont pas]] – [[radiOthello parte 15|La perception, les codes, la perception de l’autre – Wittgenstein, Quine – Le fond et la forme – La spécificité, la frontière]] – [[radiOthello parte 16|Montrer ce qui n’est pas fait pour être vu…]]
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'''Othello mal(d)écrit'''
 
  
  
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De là le fait de dire que radiOthello navigue dans les eaux de la re-création. Car les divers aspects qui composaient l’œuvre que je commençais à élaborer touchaient à une certaine idée du théâtre et de la littérature, au transfert du théâtre – scénique et écrit – sur d’autres média tout en passant par des aspects proches de la mise en scène, mais aussi par une vision critique particulière de la pièce shakespearienne, ainsi que certaines lectures d’aspects sociaux et techniques du temps que nous vivons.
 
De là le fait de dire que radiOthello navigue dans les eaux de la re-création. Car les divers aspects qui composaient l’œuvre que je commençais à élaborer touchaient à une certaine idée du théâtre et de la littérature, au transfert du théâtre – scénique et écrit – sur d’autres média tout en passant par des aspects proches de la mise en scène, mais aussi par une vision critique particulière de la pièce shakespearienne, ainsi que certaines lectures d’aspects sociaux et techniques du temps que nous vivons.
  
Othello est un maure à Venise. C’est à dire un uruguayen à Paris, un parisien à Lisbonne, un lisboète à Berlin. L’étranger que je suis.
 
Le thème de l’étranger est central dans la tragédie de sir William : Othello est à la fois un général reconnu et admiré par Venise et un étranger barbare qui ne connaît pas à fond les codes ni les subtilités des mœurs de ses habitants. Qui sait, peut être il ne les comprend tout simplement pas.
 
Il s’agit là d’un sujet infini et qui touche de plus en plus de monde : De nos jours, le flux migratoire est massif et croît de façon exponentielle. Ce sont des millions et millions les personnes qui s’établissent loin du lieu de leur naissance, parfois vivant en plusieurs endroits en même temps, ayant des origines de plus en plus diverses, et mélangées. On est arrivé à un point tel, que le mot « déraciné » ne fait pas beaucoup de sens dans un nombre de plus en plus croissant de cas. Dans notre petite planète, des notions comme « nationalité » et « appartenance » se diluent de jour en jour.
 
  
Mais la mobilité et le nombre croissant des déplacements a aussi généré des phénomènes et des situations traumatiques et tragiques qui se produisent sans cesse dans une partie non négligeable de notre planète. Et qui touchent à une quantité certainement plus élevée d’êtres humains que ceux qui se déplacent sans contraintes. Plusieurs millions d’êtres humains des plus diverses populations et ethnies se retrouvent sans « papiers » ni « nationalité » précise, devenant illisibles selon les critères des pays industrialisés et riches, qui les (dé)considèrent tout au plus comme des parias, devenant des êtres humains de deuxième catégorie, qui se retrouvent « totalement bloqués. Dans l’impossibilité d’avancer ou de reculer, de vivre dignement sur place dans un pays qui ne peut et ne veut pas les accueillir  ».
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Faisant – a contrario – partie d’une élite, la tragédie d’Othello, le général maure au service de la puissante Venise, ne fait qu’augmenter celle des plus faibles : si un privilégié comme lui peut sombrer dans le cauchemar de l’incompréhension la plus totale à quoi peuvent s’attendre les autres, simples étrangers démunis de statut ? Espérons qu’une conscience plus claire de ces faits éloigne de plus en plus les frontières qui séparent et divisent les êtres humains entre eux.
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<div class=direita>[[radiOthello parte 12|suite : La condition d’étranger]]</div>
 
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Ainsi comme Hamlet tourne au tour du père, Othello butte contre le mur qui sépare les cultures. Je me suis inspiré dans l’exemple donné par Heiner Müller et dans la façon et les méthodes qu’il a utilisées pour retravailler cette autre grande tragédie.
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Dans « Hamlet-Maschine » Heiner Müller règle ses comptes avec son père. Pour ce qui est du règlement de comptes le mien est, ça va de soi, avec la condition d’étranger. De tous ceux qui se sentent partout (dé ?)considérés étrangers. Ceux à qui on fait ressentir, souvent même sans le vouloir, qu’ils n’appartient pas tout à fait au lieu où ils sont ni non plus au lieu où ils sont nés. Cette perte d’appartenance du lieu de leur naissance doublée du fait de ne pas être considéré membre à part entière de la terre d’accueil, en dernière instance n’est certainement pas trop différente du sentiment d’un fils qui a été rejeté. Il est encore de la famille, certes, mais il est différent. Il n’est pas comme les autres. Et bien évidemment, ailleurs non plus, il n’est jamais absolument intégré. Il y a toujours un accent, la peau d’un autre teint, d’autres rituels, goûts, habitudes, mœurs, une autre vision des choses.
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Un autre aspect présent dans le « Hamlet-Maschine » de Müller
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est celui du statut d’« auteur ». De nos jours un tel statut ne  permettrait pas d’écrire un « Hamlet » tout court. Il faut « aller plus loin  ». Ainsi Müller nous livre une (re)lecture très pertinente de  l’actualité à la fin de la guerre froide, mettant en évidence les parallèles existants entre les « grands mécanismes » qui réglementaient la société au temps élisabéthain et au temps des deux Allemagnes et du bloc socialiste. Car « Hamlet Maschine » est aussi, en quelque sorte « En attendant Fortimbras ».
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L’une des fonctions de l’écrivain – si tant est qu’un écrivain en a – peut être celle de prêter sa voix à ceux qui n’ont pas. J’ai voulu donner cette voix surtout à l’étranger, à celui qui est mis de côté quand on dit nous. Mes textes s’occupant souvent des étrangers – ceci dit avec les acceptions les plus polysémiques avec lesquelles on peut charger ce mot – l’idée de radiOthello me semble particulièrement juste pour véhiculer cette fonction.
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Parler des variations à l’origine de la différentiation entre « nous » et « eux » implique plonger dans le terrain de l’origine et de la différentiation. Et du langage. Il ne s’agit pas là d’un jeu de mots  . On peut se dire que nous sommes dans un cercle comme celui de l’œuf et la poule ; mais à bien y voir, la chose fonctionne plutôt comme la roue qui fait courir le hamster : Il suffit d’enlever l’axe qui retient la roue au mécanisme et nous avançons sans contraintes. Et tout devient plus clair.
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L’idée d’avoir recours à certains aspects de la philosophie analytique pour s’attaquer aux questions des codes, de la perception et de la perception d’autrui me semble la plus adaptée à cette fonction. Les soliloques du comédien qui joue le rôle du comédien qui joue Othello – parfois empruntés directement à Wittgenstein ou Quine, parfois retravaillés à partir de leurs textes – sont assez expressifs de cette option. Les idées de Wittgenstein et Quine quant aux questions liées à la logique et la compréhension des mécanismes de la pensée avec et à travers leur langage spécifique conduisent directement aux terrains de l’origine et de la différentiation.
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On ferme ainsi le cercle tandis qu’on continue à avancer : pour le dire avec les mots de Quine « on commence toujours par le milieu. Nos premiers concepts sont toujours des concepts d’objets de dimension moyenne, situés à moyenne distance et notre accession à ces concepts et à tout autre chose survient à mi-chemin dans l’évolution culturelle de notre espèce  ».
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Version actuelle en date du 7 janvier 2008 à 15:24


RadiOthello

De « la tragédie d’Othello » à « radiOthello »


Othello « mal (d)écrit » – Othello comme thème et comme thème de réflexionLa condition d’étrangerHamlet Maschine : Une façon de « régler des comptes »L’auteur, la voix de ceux qui n’en ont pasLa perception, les codes, la perception de l’autre – Wittgenstein, Quine – Le fond et la forme – La spécificité, la frontièreMontrer ce qui n’est pas fait pour être vu…



Depuis mon adolescence, de toutes les pièces de Shakespeare celle qui m’a le plus intrigué a été Othello. Cela peut paraître prétentieux, mais pendant très longtemps ce personnage était à mes yeux le seul que le grand Willy avait décidément «mal écrit», raté. Dans ma lecture, certainement trop naïve, les manipulations de Iago ne suffisaient pas pour transformer le doux et aimant Maure du premier acte dans le sinistre et aveugle jaloux du cinquième. De tout points de vue je trouvais cela trop improbable. Relire, voir et revoir la pièce n’a fait qu’augmenter cette sensation au cours de plusieurs années. Je gardais l’impression que c’était le rôle de Iago qui s’imposait ; suspicieusement toujours «bien joué» ou du moins «mieux joué», car mieux dessiné que le rôle titre.

Il m’a été nécessaire d’aborder le texte plus tard, ajoutant une quantité d’éléments qui – peut-être parce qu’ils font partie des sujets qui me tiennent à cœur – m’ont ouvert les portes à la compréhension de divers aspects qui m’avaient échappé auparavant. Peut-être pour ne pas avoir compris tout de suite la portée des thèmes et les ramifications de la pièce, cette redécouverte d’Othello a pris une dimension inattendue et s’est transformée dans une sorte de dialogue interne, d’exercice critique miroitant, dans lequel j’ai pu réfléchir et approfondir une quantité de thèmes qui sont au centre de mon travail. Ainsi est apparue la nécessité de bâtir une de mes œuvres à partir d’Othello.

De là le fait de dire que radiOthello navigue dans les eaux de la re-création. Car les divers aspects qui composaient l’œuvre que je commençais à élaborer touchaient à une certaine idée du théâtre et de la littérature, au transfert du théâtre – scénique et écrit – sur d’autres média tout en passant par des aspects proches de la mise en scène, mais aussi par une vision critique particulière de la pièce shakespearienne, ainsi que certaines lectures d’aspects sociaux et techniques du temps que nous vivons.



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