Arnaud Churin

Arnaud Churin pendant une lecture de Sur Scène et Marne. Photo d'Yves Rousguisto

Je suis né à Alençon en Normandie. Mes parents nous ont beaucoup, mais beaucoup emmené dans les musées et dans les églises. Ce qui est surprenant c’est que mes frères et moi ne soyons ni peintre ni prêtre. Non, nous sommes tous les trois comédiens, Papa travaillait à la mairie, Maman pour les PTT.

J’ai commencé le théâtre au conservatoire de région de Rennes, en fin de première année, je rencontrais Jean Schmidt, réalisateur qui préparait un film en Mayenne, il fut très intéressé car je parlais un peu le patois de la Mayenne. J’ai connu lors de ce tournage Philippe Demarle, Olivier Py, Hélène Alexandridis, Jacques Verzier, Olivier Peigné… Ces personnes étaient mes fées à moi, mes guides. J’ai intégré l’école Théâtre en actes, dirigé par Lucien Marchal. En 1992, après avoir joué deux spectacles avec Eric Vigner et Olivier Py, je rentrais au conservatoire national d’art dramatique.

C’est un texte d’Olivier Py qui fut l’objet de mon premier travail de mise en scène, « le jeu du veuf », atelier d’élève du conservatoire, j’y dirigeais mes camarades.

Mon second travail était « L’ours Normand, Fernand Léger ». J’ai conçu ce spectacle autour de deux textes, « Le cirque » du peintre lui-même et un entretien qu’il a accordé à la fin de sa vie à Dora Vallier. Un musicien m’accompagnait dans cette évocation de mon « maître ». Il y a dans l’œuvre mais aussi dans la pensée de Fernand Léger quelque chose qui est essentiel pour moi et qui m’anime. C’est cela que j’ai essayé de rendre sur scène. Léger donne une sorte de définition de l’artiste : celui qui ne peut pas faire autrement… pour qui l’invention des formes ne doit répondre qu’à une nécessité sensuelle. Il n’est pas question de dire « regardez-moi comme je suis intéressant ». Il s’agit de dire qu’un artiste c’est celui qui traduit, dans sa langue intime, les « textes » que lui écrit le monde. Il y a un souci éthique et une idée d’acharnement dans les textes de Léger qui me le rendent proche. Le spectacle, comme je le désirais, fut joué dans des théâtres, des musées, un hôpital, deux écoles d’art, des salles de spectacle de toutes sortes…. Création en 2000, CDN de Caen, théâtre de la bastille à Paris, Théâtre du nord à Lille. L’année suivante le spectacle a été repris au théâtre de la cité internationale à Paris ainsi qu’en tournée.

Le projet suivant s’appelait « Pas Vu (à la télévision) ». Il s’agissait d’un montage de textes. Une émission des « chiffres et les lettres » de Janvier 1979 ; au cours de cette émission, mon cousin éloigné, Michel Jouaux, gagnait le match, bien qu’il fût aveugle. Il allait devenir un grand champion. C’est autour du sentiment que m’inspira sa victoire, j’avais 8 ans, que le spectacle s’est organisé. C’était un conte pour adultes : on y voit une émission des chiffres et des lettres. Madame Louson est opposée ce soir là à Monsieur Jouaux, qui est non voyant. Lors de la pause, les deux candidats se rencontrent. Ils se parlent de la nature humaine ; c’est l’enjeu de leur entretien. Mme Louson embrasse le candidat Jouaux, l’enjeu de la nature de l’homme va devenir celui de leur histoire d’amour. Le décor s’en trouve transformé. Autour de nos amoureux, de leur histoire qui est une histoire d’amour, un monde se met en place : celui de la noosphère. Cet univers est celui du produit de nos pensées, de toutes les pensées des hommes. Ce sont les présentateurs du jeu qui sont devenus les « elfes de la noosphère ». En fait Mme Louson et M. Jouaux disent les mots d’Edgar Morin et de Boris Cyrulnik, issus de « Dialogue sur la nature humaine » ; Les elfes de la noosphère, eux, utilisent les mots issus d’autres livres de Cyrulnik et Morin. A la fin le jeu reprend….Création en 2004 à la scène nationale de Chambéry, puis CDN de Caen, MC 93 de Bobigny, carré des Jalles - st Médard en Jalles, théâtre de Chelles.

Ce qui occupe le plus clair de mon temps c’est jouer. Les spectacles que je conçois sont le prolongement des questions que je me pose sur scène quand je joue.

Mon parcours commence comme je l’ai dit par Olivier Py puis Eric Vigner, dans le même temps nous commencions l’aventure « Eclat immédiat et durable » qui était le nom de notre compagnie de théâtre de rue. Ces années furent capitales pour moi autant que les années de Conservatoire au même moment. J’ai appris là à nommer les projets, à les développer, à faire des choix etc. A cette époque je travaille à plusieurs reprises avec Pierre Guillois.

Je jouerai deux spectacles avec Stuart Seide qui était mon professeur au conservatoire. Ensuite c’est « la rencontre » avec Jean-Marie Patte, j’ai joué une pièce avec lui, c’était mon rêve. Depuis mon entrée au conservatoire je nourrissais le rêve de travailler avec Patte ou Gatti. En sortant de l’école nous avons eu un très bel atelier avec Bruno Bayen, une pièce de Fassbinder encore inédite, qui se jouera au théâtre de la Bastille.

En 1998, je travaille avec Michel Didym, et depuis lors je suis régulièrement invité au festival de « La mousson d’été », autour des écritures contemporaines. L’année suivante au festival d’Avignon, je joue sous la direction d’Alain Ollivier. Je vais collaborer à deux reprises avec Laurent Laffargue : Bond et Shakespeare.

En 1999 je rencontre Eric Lacascade pour que le CDN de Caen co-produise « L’ours Normand, Fernand Léger ». En fait commence là une collaboration qui continue encore aujourd’hui, le CDN de Caen co-produira mes travaux personnels, je jouerai dans « La mouette » puis dans « Platonov ». Entre les périodes de représentation et de répétition, je participe à plusieurs stages, que je dirige, je suis l’un des « regards croisés » de « Penthésilée » adapté de Kleist par Daria Lippi et Eric Lacascade.

Une aventure avignonnaise encore avec Jean Boillot me permettra de réaliser un autre de mes rêves, jouer le Général dans « Le balcon » de Jean Genet. Dans le même temps nous travaillons Dominique Parent et moi avec Alvaro García de Zúñiga (uruguayo-portugais.), génial auteur francophone dont le travail se développe en France.

Dernièrement, Bérangère Jannelle me dirige dans « Ajax » de Sophocle, puis dans « Amor ! ou Les Cid » de Corneille. Bernard Lévy me distribue dans Antiochus dans la pièce « Bérénice » de Jean Racine et Eric Lacascade monte « Les Barbares » de Gorki, création au festival d’Athènes en juillet 2006. Pour être complet, durant cet été 2006, j’ai dirigé les acteurs et joué dans « Œdipe » de Sénèque en Nouvelle Calédonie. Jean Boissery a conçu ce projet depuis 2002 avec des acteurs essentiellement de l’île de Maré, une des îles Loyauté qui bordent la Grande-terre de Nouvelle-Calédonie. Nous avons tourné un peu partout en Nouvelle- Calédonie puis nous avons été accueillis au Festival de la Francophonie à Limoges en octobre 2006.

Ah ! Et j’étais fier d’être le numéro 3 de l’équipe de France de rugby de théâtre entraînée par Guillaume Rannou dans un essai collectif sur le rugby, spectacle joué au théâtre de la cité internationale


résumé



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